14 Avr, 2025
Mis à jour le 20 Avr, 2025
13 min de lecture
L’agriculture numérique est devenue un levier essentiel pour transformer les pratiques agricoles traditionnelles dans toute l’Union européenne. Face aux défis tels que le changement climatique, la croissance de la population et les exigences accrues en matière de durabilité, l’intégration d’outils agricoles numériques est devenue indispensable.
Le secteur agroalimentaire est l’un des plus importants de l’économie européenne. Près de 44 millions d’emplois dans la transformation des aliments, la distribution et la restauration en dépendent. Environ 12 millions d’agriculteurs y travaillent actuellement. La moitié du territoire européen est consacré à l’agriculture, où vivent environ 20 % de la population de l’UE. Numériser ce secteur aura donc un impact significatif sur l’économie et la population européennes.
Toute analyse de la situation doit commencer par un état des lieux. Pourtant, en raison du nombre croissant de projets, de subventions, d’initiatives et de soutiens gouvernementaux en cours dans l’UE, il est encore trop tôt pour disposer de chiffres définitifs. Cela en dit long : le processus est bien lancé, mais encore en phase de croissance.
- En 2023, 90,5 % des foyers ruraux de l’UE avaient accès à Internet, ouvrant ainsi la voie à une pénétration massive des outils numériques dans l’agriculture.
- Cependant, près de la moitié des pays de l’UE rapportaient en 2022 une couverture rurale inférieure à 50 % pour les réseaux fixes capables de fournir du gigabit, avec des progrès lents. Cela se traduit par une couverture globale de 41 % dans l’UE. Ces chiffres peuvent constituer un frein à l’adoption d’outils gourmands en données, comme la télématique vidéo, pourtant essentielle dans l’agriculture numérique moderne.
- Une enquête menée auprès de 250 agriculteurs en Italie centrale montre que 69 à 78 % utilisent des smartphones et des ordinateurs pour leurs activités. Des taux similaires sont observés en Allemagne et dans de nombreux autres pays.
Allons-nous obtenir une image plus claire de la transformation numérique de l’agriculture dans les prochaines années ? Cet article retrace le parcours de l’UE dans l’introduction de l’innovation dans l’un de ses plus anciens secteurs, en analysant son état actuel et ses premiers résultats concrets.
Pourquoi la numérisation de l’agriculture compte
La FAO prévoit que plus de 90 % de la croissance de la production alimentaire mondiale d’ici 2050 proviendra d’une augmentation du rendement des terres arables existantes, grâce aux avancées de la recherche agricole. La mise en œuvre et la transmission de ces connaissances aux agriculteurs par le biais de liens fructueux entre la recherche et la vulgarisation, ainsi que le développement de nouveaux écosystèmes, seront essentiels pour atteindre des niveaux de production plus élevés. Mais l'UE a-t-elle réellement besoin d'augmenter la production alimentaire en tant que telle ?
Répondant à la demande alimentaire de l’UE
La population de l'UE devrait connaître une légère croissance au cours des cinq prochaines années, suivie d'un déclin régulier jusqu'à la fin du siècle. Dans l'ensemble, la production agricole de l'UE devrait croître plus lentement qu'auparavant et pourrait diminuer pour certains produits de base d'ici 2035.
Toutefois, d'autres facteurs susceptibles d'entraîner une baisse de la production doivent être pris en compte.
Le changement climatique affecte les ressources naturelles clés et représente un risque majeur pour la productivité agricole. Assurer la stabilité et la résilience de la production face à ces perturbations est une priorité pour la prochaine décennie.
Selon de nombreuses instances d’évaluation, un événement climatique extrême hypothétique pourrait affecter les fournisseurs mondiaux d’aliments pour bétail d’ici 2035. Par conséquent, la chaîne d’approvisionnement de l’UE en alimentation animale serait elle aussi impactée, avec des effets indirects sur les producteurs de viande, puisque l’UE est importatrice nette de protéines destinées à l’alimentation animale.
L’amélioration de l’efficacité de l’alimentation animale dans l’UE et des rendements en cultures riches en protéines grâce à l’agriculture numérique peut renforcer la résilience du secteur européen de la viande et réduire sa dépendance aux importations de protéines.
Durabilité et enjeux climatiques
L’agriculture a un impact significatif sur l’environnement, représentant environ 10 % des émissions totales de gaz à effet de serre de l’UE. Ces émissions proviennent de diverses sources, notamment de l’élevage, de la culture des plantes et des pratiques de gestion des sols. Par ailleurs, certains rejets sont indirects : les émissions de CO₂ liées à l’usage de carburants fossiles ou à l’électricité utilisée pour le fonctionnement des machines, le séchage des cultures ou encore la fabrication d’engrais et de pesticides sont comptabilisées dans le secteur de l’énergie.
Bill Gates estime que nous devons tendre vers une économie à émissions nulles pour éviter une catastrophe climatique. Ainsi, toute réduction des émissions est non seulement bienvenue, mais aussi indispensable et déjà planifiée : l’agriculture numérique répond à de nombreuses problématiques dans cette équation mondiale.
Tendances de consommation et traçabilité
Les consommateurs européens sont de plus en plus attentifs à l’origine et à la sécurité des aliments qu’ils consomment, ce qui entraîne une forte demande de transparence dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Ils s’intéressent également aux critères éthiques – tels que l’élevage en plein air, les pratiques d’abattage respectueuses ou le respect des rites religieux (halal, casher, etc.) – qui influencent leurs décisions d’achat et leurs attentes en matière de traçabilité.
Cette prise de conscience a fortement stimulé la croissance du marché de la traçabilité alimentaire en Europe. En 2023, ce marché a généré environ 4,07 milliards de dollars de chiffre d’affaires et devrait croître à un taux annuel composé de 9,3 % entre 2024 et 2030.
Répondre à ces exigences suppose inévitablement le recours à des technologies agricoles numériques : blockchain pour des registres immuables, capteurs IoT pour un suivi en temps réel, ou encore analyses assistées par l’IA pour optimiser la chaîne d’approvisionnement et garantir la conformité aux normes de sécurité alimentaire.
Outils et technologies pour la numérisation de l’agriculture
Numérisation à l’ancienne : vers une gestion sans papier
Une ferme sans papier, ce n’est pas seulement se passer de carnets de suivi ou de listes d’inventaire écrites à la main. Cela implique aussi la suppression des factures papier et des documents liés à la flotte, comme les journaux de tournée ou les fiches d’entretien. Cela signifie également des enregistrements électroniques de conformité, incluant la traçabilité de l’utilisation des pesticides et autres produits chimiques.
L’agriculture de précision
Les drones sont utilisés pour surveiller les cultures avec une grande précision dans le cadre de l’agriculture numérique
L’agriculture de précision utilise des technologies comme les drones, les tracteurs guidés par GPS, les capteurs de sol et l’imagerie satellite pour surveiller et gérer les cultures avec une extrême précision. Ces outils permettent d’appliquer les intrants (eau, engrais, etc.) uniquement là où c’est nécessaire, optimisant ainsi les ressources et les rendements.
IoT et analyse de données
Les solutions IoT incluent désormais des capteurs et d'appareils répartis dans les champs ou les serres, collectant des données en temps réel sur l’humidité du sol, les conditions climatiques ou l’état des cultures. Concrètement, un agronome n’a plus besoin d’aller physiquement prélever des échantillons : il reçoit les données directement depuis son bureau grâce aux outils d’agriculture numérique.
L’analyse des mégadonnées (big data) traite ces informations pour fournir des recommandations pratiques et alimenter des décisions prédictives. Son impact est d’autant plus marquant pour les grandes exploitations agricoles, où la gestion de vastes quantités de données provenant de multiples champs, machines et de la logistique de la chaîne d'approvisionnement est cruciale pour l'optimisation de l'efficacité et la réduction des coûts.
Intelligence artificielle
Les algorithmes d’IA analysent les données pour prédire les maladies des cultures, optimiser les calendriers de plantation, ou encore réduire les erreurs humaines.
Au-delà des usages strictement agricoles, l’IA permet de simplifier les tâches opérationnelles comme la gestion financière, la logistique ou l’administration. Ces domaines sont essentiels pour les exploitants agricoles qui font face à des marges très sensibles aux fluctuations des coûts et du marché.
Enfin, l'IA polyvalente peut s'avérer très utile pour les petits entrepreneurs agricoles qui doivent tout gérer eux-mêmes, du travail sur le terrain à la comptabilité, en passant par la commercialisation de leurs produits et leur livraison aux magasins, aux distributeurs ou aux sites de production.
Informatique en nuage et en périphérie
Pour les petites exploitations, les solutions cloud offrent un accès abordable à des outils d'analyse et de prise de décision avancés, sans infrastructure importante sur place. Pour les grandes exploitations, le cloud permet d’intégrer diverses sources de données (capteurs IoT, prévisions météo, outils de gestion logistique) et d’optimiser les opérations à grande échelle.
L'informatique en périphérie, quant à elle, fournit des solutions à faible latence en traitant les données localement dans l'exploitation, ce qui garantit des réponses rapides aux processus agricoles critiques tels que l'irrigation automatisée, la surveillance du bétail ou les diagnostics d'équipement en temps réel. Cela est particulièrement utile dans les zones rurales où la connectivité à large bande est limitée, où la prise de décision en temps réel est cruciale mais où l'accès au nuage peut être intermittent.
Le rôle de la gestion de flotte dans l’agriculture numérique
Dans l’agriculture moderne, les tracteurs, moissonneuses, systèmes d’irrigation mobiles et véhicules de transport jouent un rôle clé à toutes les étapes – de la plantation à la distribution. Avec l’agrandissement des exploitations, la capacité à suivre, automatiser et optimiser les opérations de flotte devient indispensable pour préserver l’efficacité et réduire les coûts.
Cette section montre comment les solutions de gestion de flotte participent à la transformation numérique de l’agriculture, la rendant plus durable, performante et compétitive.
Suivi en temps réel et données historiques
Comme pour toute flotte, commerciale ou non, la visibilité en temps réel présente de nombreux avantages : elle permet de contrôler et de répartir les véhicules, qu'il s'agisse de transporter des récoltes ou d'effectuer des travaux dans les champs, et de s'assurer que le travail est effectué exactement comme il se doit. Si un tracteur manque une partie du champ pendant le travail, il est préférable que le répartiteur le voie immédiatement et en informe le conducteur pendant qu'il est encore dans le champ à proximité.
Les données historiques sur les flottes agricoles et associées sont essentielles pour l'agriculture numérique, et ce pour de nombreuses raisons. L'une d'entre elles est la réduction des coûts : si votre camion est revenu du champ avec moins de carburant que prévu, vous voudrez peut-être savoir si c'est parce qu'il est resté coincé dans la boue pendant une heure et demie ou si quelqu'un a vidangé un peu de carburant.
Automatisation de la maintenance
Les exploitations agricoles dépendent de véhicules et machines souvent coûteux, dont la maintenance est essentielle. Posséder des dizaines, voire des centaines de véhicules dans une exploitation agricole et demander à quelqu'un de suivre les contrôles effectués sur les moissonneuses, sans parler de les suivre dans un fichier Excel, ne sera pas viable en 2025 et au-delà. Les outils d’automatisation de la maintenance sont donc incontournables.
En outre, cela vaut non seulement pour l'automatisation, mais aussi pour l'utilisation de la maintenance prédictive : elle peut réduire les coûts de maintenance de 30 à 40 % par rapport aux stratégies de maintenance réactive. En d'autres termes, il est plus économique d'envoyer la voiture à l'atelier de carrosserie avant qu'elle ne tombe en panne.
Retour à la dématérialisation
La dématérialisation est l’un des nombreux aspects de l’innovation numérique en agriculture
Ce n'est pas pour rien que cet article comporte deux sections ainsi nommées. Cette initiative est déjà largement adoptée en Europe. Un bon exemple est l’obligation d’utiliser les e-CMR (lettres de voiture électroniques).
Les agriculteurs utilisent de plus en plus des plateformes numériques pour enregistrer les traitements phytosanitaires, les opérations de maintenance ou les documents de conformité, remplaçant ainsi la paperasse.
Intégration avec les logiciels de gestion agricole
L’intégration des systèmes de gestion de flotte avec les plateformes de gestion agricole permet des opérations synchronisées. Par exemple, une plateforme de gestion de flotte peut automatiquement enregistrer des données dans des bases de données de suivi des cultures lorsqu'une opération spécifique est effectuée dans le champ.
Et après ?
Le paysage numérique de l’agriculture européenne est déjà bien développé, mais il va continuer à évoluer rapidement. Voici quelques perspectives à court terme.
Extension des solutions de gestion de flotte
D’après les dernières données, le nombre de systèmes actifs de gestion de flotte devrait passer de 16,3 millions fin 2023 à 27,6 millions en 2028. Cette croissance concerne également les flottes agricoles. Mais ce n’est pas tout : à mesure que les outils de gestion de flotte évoluent, ils s’adaptent à des tendances spécifiques et influencent les secteurs dans lesquels ils sont déployés — y compris l’agriculture numérique.
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Prévisions pour l’avenir
Ce potentiel soutiendra-t-il réellement le développement de l’agriculture numérique dans les exploitations européennes ? La réponse est sans équivoque : oui.
Le marché de l’agriculture numérique dans l’UE connaît une croissance rapide, comme le montrent les chiffres :
- D’ici 2027, le marché européen de l’agriculture intelligente est estimé à 8,4 milliards de dollars, soit plus du double de sa valeur de 2021.
- Environ un tiers des entreprises européennes ont déjà adopté l’IA, avec un taux de croissance de 32 % sur un an. Si cette dynamique se poursuit, l’adoption de l’intelligence artificielle pourrait générer 600 milliards d’euros de valeur ajoutée supplémentaire pour l’économie européenne d’ici 2030 — un chiffre qui inclut inévitablement le secteur agricole.
- Le nombre de connexions IoT actives dans l’agriculture numérique de l’UE augmente de manière constante, passant de 0,51 million en 2016 à une estimation de 2,27 millions d’ici 2025 — signe clair d’une intégration croissante des dispositifs IoT dans les exploitations agricoles.
- Le marché européen de l’agriculture de précision, évalué à 2,47 milliards de dollars en 2022, devrait atteindre 4,36 milliards d’ici 2027, avec un taux de croissance annuel moyen de 12,02 %.
- Ces chiffres — parmi d’autres — démontrent clairement que la numérisation de l’agriculture européenne est bien engagée. C’est une opportunité majeure pour les entreprises agricoles d’adopter de nouvelles méthodes et de consolider leur position sur le marché, tout en stimulant la demande en solutions spécialisées dans la numérisation, la gestion de flotte, l’IoT et la connectivité.
Conclusion
En 2025, l'Union européenne (UE) comprend 27 pays membres, abritant collectivement une population d'environ 450 millions de personnes. Au sein de l'UE, le secteur agricole reste un employeur important, représentant 4,2 % de l'emploi total.
L’impact de l’agriculture numérique, en tant que secteur aussi stratégique, ne tardera pas à se faire pleinement sentir. Elle va transformer les chaînes logistiques, les exportations, la production et de nombreuses industries interconnectées, en insufflant efficacité et innovation à grande échelle.
Chez Wialon, nous développons depuis plus de vingt ans des solutions de digitalisation des flottes. Nous sommes fiers de contribuer à l’évolution de la gestion de flotte, un pilier essentiel dans la transformation numérique du secteur agricole.
Vous souhaitez en savoir plus sur la façon dont la digitalisation des flottes et les tendances en gestion influencent le paysage européen — qu’il s’agisse de mobilité intelligente ou d’électrification des flottes ?
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